Alors que la pluie, l’orage et les supporters des Bleus sévissaient dehors, le frêle canadien Andy Shauf arrosait de son talent la petite scène de la Péniche à Lille. Retour sur ce moment de tendresse et de justesse.
Dans une salle étrangement bien remplie, Andy Shauf apparaît exilé sur un côté de la scène, avec sa raie de côté et ses cheveux filiformes qui tombent jusqu’aux poignets. Il a tout du poète fragile et mal dans sa peau, à la Elliott Smith, similarité qu’on avait déjà remarquée en écoutant ses compositions mélancoliques.
Sa voix claire et retenue fait directement mouche, tout autant que le minimalisme de l’instrumentation pop/folk, limitée à quelques accords simples à la guitare, une basse chaude mais dissipée, un clavier et une batterie en retrait. On atteint le summum de simplicité sur certains titres, où seul le chant pur d’Andy fait le boulot sur un accompagnement on ne peut plus illusoire.
Ce qui frappe, c’est cette légèreté absolue de l’ensemble, une musique dépouillée mais loin d’être désincarnée, bien au contraire. Ce paradoxe entre finesse et complexité de composition maintient ébahi même sur ces morceaux les plus mous, au BPM inférieur à celui d’un rythme cardiaque de phase terminale.
Inutile de le nier pour autant : on s’ennuie un peu parfois. On aimerait que ses quelques montées en intensité n’aboutissent pas à un retour au calme plat, que la batterie s’élève enfin et que la puissance des mélodies trouvent une résonance rythmique… Mais que nenni. Le gars enchaîne les titres, de ses plus belles réussites (« You’re Out Wasting« , « The Worst In You« , « Hometown Hero« , « Jenny Come Home« , le superbe nouveau single « The Magician« ) à ces quelques moments désemparant de vide (« Wendell Waker » notamment, qui est un superbe morceau mais traîne sur 9 minutes d’ennui poli quand il est joué avec autant de retenue).
Son rapport avec le public est limité à quelques « thanks » tout juste audibles, un « I never played on a boat before » hésitant et le « I am so excited » le moins convaincu et convaincant jamais prononcé. L’interactivité avec autre chose que sa guitare n’est de toute façon pas sa force, et c’est bien là un moindre mal. Le public n’est d’ailleurs pas vache pour autant, célébrant chaque fin de chanson comme celle de son propre gosse à la chorale de l’école.
Malgré ce côté un peu terne sur certains passages, en résulte une impression plus que positive. Si je suis venu voir le poète Andy Shauf, c’est que je voulais le voir dénuder ses délicieuses ritournelles pop, la grâce de sa folk intemporelle. Et grand bien m’en a pris.
Merci à La Péniche une fois encore !