Trent Reznor et Atticus Ross en bande-son, c’est devenu une sorte d’habitude. Depuis leur Oscar pour The Social Network, ils sont partout : films, séries, jeux vidéo… jusqu’à l’overdose ? Disons que ces dernières années, leur patte sonore ultra-maîtrisée mais souvent trop froide pouvait laisser sur sa faim. Avec Challengers, le duo revient avec une approche plus rythmique, plus club, et plus Nine Inch Nails sur certains morceaux. Et pour une fois, l’expérience fonctionne aussi bien dans le film qu’en dehors.
Un miracle ? Non. Mais un retour en forme, et ça fait plaisir, ce qui explique mon envie de chroniquer cette, pourtant, énième BO du duo !
il faut dire que cette fois le duo a été sollicité par la réalisateur Luca Guadagnino qui avait déjà sorti une superbe BO aux côté de Thom Yorke pour le film « Suspiria ».
Where is everybody ? On the dancefloor !
Si leurs dernières BO (Bones and All, Empire of Light) avaient tendance à jouer la carte du minimalisme un peu lisse, Challengers se détache nettement. L’ambiance y est bien plus rythmée, presque clubbing, avec des influences techno berlinoise et rave des 90s, ce qui colle parfaitement au film de Luca Guadagnino. On sent que la tension érotico-compétitive du film a inspiré Reznor et Ross à lâcher un peu les drones ambient pour quelque chose de plus viscéral et quasi joyeux.
Dès les premières notes, Challengers impose un groove mécanique, et des morceaux comme “I Know” enfoncent le clou avec une trouvaille sonore assez jouissive : on y entend carrément un match de tennis en fond sonore, mêlé aux nappes électroniques et aux percussions ultra-séquencées. Ça pourrait être un gimmick, mais dans le contexte, ça fonctionne.
Et ce n’est pas la seule astuce sonore qui fait mouche. Le titre éponyme, “Challengers”, s’arrête net… sur une sonnerie d’iPhone. Quoi qu’il en soit, ça surprend, et c’est ce genre de petits détails qui rappellent que le duo sait encore prendre des libertés avec le format de son titre qui fonctionne, finalement, aussi bien dans le contexte du film que de la BO à proprement parler.
Reznor renoue (un peu) avec Nine Inch Nails.
Mais la véritable attraction de cette BO, c’est “Compress / Repress”, où Reznor repose enfin sa voix sur une bande-son. Ce n’est pas un grand retour au chant façon Hurt ou Something I Can Never Have, mais ça suffit pour réveiller les fans qui l’attendaient au micro depuis trop longtemps.
Musicalement, le morceau dispose encore une fois d’un groove électronique malsain qui évoque certaines productions de Nine Inch Nails en mode minimaliste. C’est une excellente addition à l’album.
Dans la même veine, “Final Set” est sans doute le morceau le plus NIN-friendly de l’album. Il déploie une ambiance industrielle, froide, avec des pulsations électroniques menaçantes qui auraient pu avoir sa place sur un Ghosts I-IV (comme beaucoup de leurs BO me direz-vous).
Ils m’ont eu ces coquins !
Si Challengers marque un vrai regain d’énergie dans la filmographie musicale du duo, il n’évite pas totalement l’écueil de la redondance. Certains titres s’appuient un peu trop sur les mêmes motifs répétitifs (« Yeah x10 » et « Stopper » ou encore « A New Carol » en deux parties).
Là où Gone Girl jouait sur la tension et la dissonance, The Social Network sur les textures cristallines et froides, et Mank sur une approche jazz-noir, Challengers campe sur son esthétique clubbing et au BPM plus élevé qu’à l’accoutumée.
Avec Challengers, Trent Reznor et Atticus Ross reviennent à quelque chose de plus viscéral et pulsé, loin des nappes atmosphériques parfois trop sages de leurs derniers travaux. C’est une BO efficace, qui accompagne parfaitement un film qui m’avait pourtant laissé sur une sorte de point d’interrogation. Je ne sais pas si j’ai aimé ou non mais une chose était certaine, la BO avait fait son petit effet sur moi (et le charme de Zendaya un peu aussi).