Il est de ces gens à la limite du supportable, dont chaque geste ou action se transforme en or. C’est le cas de Kevin Morby, qui, anciennement en compagnie de Woods (en tant que bassiste), avec The Babies, ou en solo, comme ici avec son troisième album, le confirme sans aucune forme de contestation possible. La rupture avec ses anciens comparses de Woods est désormais totalement consommée, puisque ce nouvel album ne parait pas sur Woodist, label du groupe, mais sur Dead Oceans. Rupture en bon terme, mais également rupture stylistique.
Ain’t no mountain high enough…
Sorti mi Avril de cette année sur le label Dead Oceans (A Place To Bury Strangers, Destroyer, The Tallest Man On Earth..), Singing Saw, troisème album « tout seul » de Kevin Morby, nous propose 9 titres pour 43 minutes. On reprend ce qui avait marché lors de ces deux précédents essais, à savoir un folk classique, avec quelques envolées teintées rock. Loin de se reposer sur les lauriers plantés lors de ses deux opus passés, notre blondinet les a au contraire fait pousser de fort belle manière pour nous offrir ici sa pièce la plus maîtrisée jusqu’ici. Que ce soit au niveau composition, arrangement, ou voix, rien ou presque n’est à jeter. Le travail fourni est en tout point admirable, et donne dès les premières mesures la sensation d’écouter son meilleur album jusque là. Et quand on sait que le gars n’a que 28 ans, on se dit son avenir s’annonce d’ores et déjà radieux.
… Pour un Kevin Morby au sommet
Autant prévenir tout de même, on n’est pas dans le même registre que Woods ou Whitney, pour citer des groupes chroniqués récemment sur nos pages. Si ses anciens comparses se complaisent à explorer des contrées psychées, Kevin nous renvoie direct dans le réel et le concret. Cet album est à la fois brillant et d’une noirceur certaine (le clip d’« I Have Been To The Mountain »). Si on ne peut s’empêcher de penser à Bob Dylan, pour ne citer que lui et éviter le name dropping toujours gênant, Kevin a su développer son univers, dont les superbes (et souvent assez discrets) arrangements, lui confèrent son identité propre.
Rien a jeter ou presque donc ici. On en vient même à regretter que seuls 9 titres soient présents sur cet album, qui, certes, n’égaiera pas nos soirées d’été, mais ravira tout de même nos oreilles pendant un bon moment. On se quitte avec une session chez KEXP datant de début Juin, histoire de voir ce que Kevin Morby vaut en vrai.