Chino Moreno est récemment allé discuter au micro du Peer Pleasure Podcast, ce qui lui a donné l’occasion de répondre aux deux questions que tout le monde se pose mais n’ose pas poser, par délicatesse, à savoir : que pense-t-il des théories de Stephen Carpenter et est-ce qu’« Eros » est ou non définitivement abandonné ?
Spoiler alert : ses réponses sont fort classes et le Chino est décidément un chouette type.
C’est quoi le problème avec Stephen ?
Les théories conspirationnistes de Stephen Carpenter ne sont pas nouvelles, mais le guitariste les a beaucoup partagées ces derniers temps. Il est d’ailleurs toujours chaud : allez voir les réseaux de Sol Invicto pour vous en convaincre.
Interrogé là dessus, le Chino s’est confié :
« Je suis étonné qu’il ne soit pas devenu un meme. Je pense qu’il doit y en avoir un ou deux. Mais ça a vraiment été dur à un moment, parce qu’évidemment on est amis depuis nos dix ans et tu sais qu’il n’a pas toujours été comme ça.
Je dirais que la weed a un peu joué un rôle dans ses théories conspirationnistes parce que tu vois… Il est sûrement chez lui en train de regarder le genre de sites qu’il regarde… Probablement que ça n’aide pas d’être défoncé…
Mais c’est bizarre, parce que quand on est ensemble on ne parle pas du tout de ces choses là. On joue de la musique, on rit et on passe un bon moment ensemble à jouer de la musique. On est toujours amis de la même façon que quand on était gamins. Mais ce n’est pas comme si je ne l’avais jamais entendu partir dans une de ses tirades où je vais l’écouter pendant deux minutes puis je vais arrêter parce que c’est juste pas possible, tu vois ce que je veux dire ?
Mais oui c’est assez dur. Parce qu’évidemment je veux le soutenir, je pense que chacun devrait avoir le droit d’avoir son opinion.
Je ne m’autorise pas à dire qu’il devrait penser comme ci ou comme ça.
Je pense que c’est un peu bizarre, sa vision du monde, de la planète elle-même… Mais je veux dire, tu sais que je l’adore, mec.
Il est vraiment, vraiment sincère. Et il est intelligent, ce qui est fou. Il est vraiment gentil. C’est probablement une des personnes les plus généreuses que j’aie jamais rencontré. Et il a toujours été comme ça depuis qu’on est enfants. »
Le Bataclan
Pour expliquer la pensée de son pote, Chino est revenu sur sa paranoïa, probablement accentuée par son expérience du Bataclan.
« Je ne pense pas que ce qu’il dise vienne d’un mauvais sentiment. Parce qu’il est vraiment inquiet par la société. Et je pense que c’est un peu de la paranoïa. Je ne veux pas parler à sa place, mais j’ai l’impression que la weed ne l’aide pas de ce côté-là, qu’il est paranoïaque.
Et il a le droit de l’être à propos de certaines choses. je ne sais pas si beaucoup de gens le savent, mais je vais partager ça ici : on était à Paris pendant les attaques du Bataclan. Et on devait jouer au Bataclan le soir suivant. Les trois soirs suivants. On faisait trois soirs là-bas.
On était arrivés il y a quelques jours et la veille de notre premier concert les Eagles of Death Metal jouaient. Stephen et Juan, notre assistant, et une autre personne, notre guitar tech je crois, ils sont allés au concert.
Et ils étaient dans le public. Ils ont probablement vu la moitié du concert et ils se sont dits « OK, on va rentrer tôt, aller prendre quelque chose à manger… ». Et ils ont quitté le concert quelques minutes avant que les terroristes n’entrent dans la salle.
Je veux dire… J’étais à l’hôtel en train de regarder les infos, de voir les événements se dérouler. Puis j’ai commencé à recevoir tous ces appels de gens qui me demandaient ce qui se passait. Mais je me rendais bien compte à ce moment-là qu’il était perturbé, d’avoir échappé à ça.
Mais je pense que… wow, à quel point il a été proche de cette tragédie. Donc je sais que ça l’a affecté. Donc je sais qu’il a une part de traumatisme qui vient de ça. Et c’est dur, je peux pas imaginer.
Je veux dire, j’étais pas là, mais j’allais y être le soir suivant. Et si ça s’était produit le soir suivant ? Ma fille était avec moi, elle devait avoir 13 ans à ce moment-là. Et ma femme, elles étaient avec nous. Si elles étaient là elles auraient été sur le côté de la scène à nous regarder jouer.
Je pense à ces choses là et c’est lourd. Et je sais que je ne peux m’imaginer avoir été là ce soir-là. »
Eros
L’autre question qu’on n’ose plus lui poser mais à laquelle il a répondu en détails c’est « Eros » : l’album en cours d’enregistrement au moment de la mort du bassiste Chi Cheng.
« Il y a peut être l’équivalent d’un EP qui a des voix, mais le reste… c’est clairement pas fini. Il y a des mélodies et des idées, mais pas encore de mots posés dessus. J’étais encore en train de travailler dessus quand Chi a eu son accident et on a tout arrêté. Alors ce n’est pas terminé.
Je pense qu’il y avait onze ou douze chansons pour cette session. J’avais terminé la chanson « Smile ». J’avais enregistré le chant chez Shaun Lopez (de Crosses). A ce moment on avait déjà travaillé sur cet album avec tellement de personnes différentes…
Terry Date s’est occupé de toute la musique. Mais c’était quand j’habitais à Burbank et Shaun était mon voisin. Alors je skatais jusqu’à sa maison parce que j’adore enregistrer le chant avec lui. J’adore son traitement de ma voix. Il a une cabine d’enregistrement super confortable, une bonne vibe et c’est quelqu’un avec qui on peut échanger.
Alors j’ai fini cette chanson, mais je crois qu’elle n’a jamais eu de mix et master. C’est juste un mix rapide de ce que j’ai fait chez Shaun ce soir-là. Mais c’était l’anniversaire de la mort de Chi. Je l’avais retrouvée sur mon ordinateur quelques jours avant et j’étais juste, tu sais quoi, je vais juste le faire, sans rien dire au groupe, juste la sortir. Littéralement, sur Youtube. Je l’ai mise sur Youtube et c’est tout.
Je l’ai un peu leakée et c’est à ce moment-là que les gens se sont dits « Oh, l’album entier et terminé alors, pourquoi est-ce qu’on peut pas l’entendre ? » Mais la vérité c’est qu’il est pas terminé. C’est probablement la seule chanson qui est « finie finie ». Il y en a d’autres qui l’étaient presque, mais honnêtement je n’ai jamais ouvert ces fichiers. Je n’ai jamais ouvert ce disque dur pour voir ce qu’il y a dedans.
Evidemment pour nous c’est assez sacré, parce que c’est les derniers trucs sur lesquels Chi a joué. Quand on enregistrait « Diamond Eyes » je ne voulais pas écouter ces chansons. C’était tellement frais, on préférait continuer d’avancer et faire de la musique sur le moment.
Si je les avais mises sur l’album, ça m’aurait ramené à cette époque, que je voulais quitter. Et j’hésite encore à aller les écouter. C’est probablement pour ça que je n’ai pas réécouté la plupart de ces fichiers.
Je dirais que je me rappelle que ce n’était pas si génial. Je me rappelle que quand on a terminé l’enregistrement je me suis dit « Eh, on pourrait écrire de meilleures chansons ». Il y avait quelques bons moments, mais je me souviens ne pas être si enthousiaste.
Et c’était un bon moment. On passait un bon moment à écrire ça. On s’entendait tous tellement bien. On travaillait à Sacramento à notre studio et on était enfin sortis de cette période un peu sombre, qui avait commencé avec l’album éponyme et a continué jusqu’à l’enregistrement et la tournée de « Saturday Night Wrist ». On commençait à réparer nos amitiés et tout le monde était de nouveau à la même page.
« Eros » sonnait assez fragmenté. Personne ne prenait vraiment les choses en main. On réparait nos amitiés alors j’ai vraiment fait un effort pour ne pas dicter la direction dans laquelle l’album devait aller. J’allais juste prendre du recul pour laisser chacun être soi-même, ce qui est génial. Mais on n’avait pas vraiment de producteur, alors personne ne pilotait. Et ça manquait de direction. Alors aussi fun et plaisant que c’était à enregistrer, ce n’était pas aussi bon que ça aurait pu être. »
« Eros » sortira-t-il sous une forme ou une autre ? Chino répond simplement qu’il ne faut « jamais dire jamais » mais qu’il lui faudrait le temps et la motivation pour le faire et qu’il ne voudrait pas le faire seul mais vraiment en collaboration avec le reste du groupe.
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Source : Le PRP