5 disques en 10 ans pour Father John Misty. Après être passé inaperçu pendant trois albums sous le nom de Josh Tillman, son alter ego l’a permis d’occuper le terrain public et médiatique constamment. Avant de passer sous les radars depuis maintenant deux ans. Chloë and the Next 20th Century amène un nouveau virage et on vous raconte comment, sans connaître trop le pourquoi.
Un an sur l’étagère.
Ce disque s’est écrit entre août et décembre 2020, avec le collaborateur de toujours Jonathan Wilson à la co-production. Une suite de balades, prenant la suite des routes assagies de Pure Comedy et God’s Favorite Customer sans cynisme ou instruments électriques. Pianos, cuivres et cordes sont les seules accompagnantes de la voix cristalline d’un FJM qui n’a jamais été aussi paisible ou mélo.
C’est là que le bât blesse. Aussi soigné, chiadé que peuvent l’être ses disques, on commençait à s’ennuyer crescendo et celui-ci n’enraye pas la tendance. Au contraire. L’interminable Buddy’s Rendez-vous arrive au quart d’heure de tracklist et on a l’impression que d’écouter la mélodie du temps qui passe. Les titres s’enchaînent avec des variations certes mais le rythme est similaire et cela ne s’emballe… jamais. Cela se passerait peut-être mieux si certains titres ne s’étiraient pas comme Kiss Me (I Loved You) ou si un single se démarquait du lot. Bizarrement, Olvidado (Otro Momento) et sa balade bossa nova réussit à nous faire marcher. Tout comme (Everything But) Her Love nous capte plus grâce à son démarrage en contre-temps pour mieux ronronner hélas dans les refrains.
Le tapis rouge est déroulé mais on ne se prend pas complètement pas les pieds dedans. Q4 tire son épingle de la tracklist très vite et demeure le ticket d’entrée sur ce spectacle 5 étoiles avec ses accords sixties virevoltants. Comme tout bon maître de cérémonie, Father John Misty soigne sa sortie et le baisser de rideau attire tous les regards par sa gestion du rythme et l’incursion des riffs de guitares par fulgurances.
Cette évolution sonore vers un tempo ralenti et une place importante laissée aux cuivres n’est pas une surprise, puisque les deux derniers albums favorisaient les titres plus longs et ce type d’arrangement. Un sentiment de mélancolie et d’amertume se dégage globalement, comme si le narrateur se rappelait au fil du disque un personnage féminin idéalisée ici dans le cadre d’une rupture… Ce qui nous manque ici, c’est la grandiloquence de certaines compositions, ainsi que le sel habituel des paroles du père John Misty qui sonne ici très magistral dans son interprétation comme dans son écriture. Qui parfois pourrait sembler sortir d’un disque de Michael Bublé, pas étonnant puisqu’il s’était décrit via un énième troll comme une version sarcastique de ce dernier.
En une ligne, ce disque se résume par un croisement entre une comédie musicale, une partition de crooner et l’americana. Une sorte d’hommage au Hollywood des années 50 teintées de références actuelles histoire d’y ajouter une double lecture humoristique. Autre surprise de ce disque, son artiste se fait inhabituellement muet sur la promo. Ce grand manitou a sûrement déjà la suite dans la manche ? Peut-être mais en attendant d’avoir la certitude, ce disque demeure un bel exercice sur lequel on est passé à côté. Sûrement pas de la faute de son artiste mais plutôt de notre goût pour l’orientation musicale choisi. Ce n’est pas faute d’avoir essayé mais nous n’avons peut-être pas percer tous les mystères de ce potentiel grower et l’on préfèrera et attendra pour l’instant le retour d’un FJM caustique et enlevé.
Pour conclure, ce live réalisé à Londres la veille de la sortie de l’album nous donne un aperçu du résultat live avant de pouvoir ça Salle Pleyel à Paris en mars… 2023 ! Encore une fois, les morceaux sonnent bien, sont beaux mais est-ce que cela suffit pour nous emballer ? Hélas, non.