Grizzly Bear a su se frayer un chemin à part dans les travées très fréquentées de la folk. Dépourvus de barbe, de chemise à carreaux et de présence médiatique, ils savent garder cet intérêt du public presque uniquement via leurs créations. Toujours enrobé d’un emballage artistique très soigné, les voici de retour avec Painted Ruins après 5 ans d’absence. Shields nous avait laissé un souvenir aussi bon que lointain et sa suite méritait forcément que l’on s’y penche. Ed Droste et sa bande ont longtemps teasé sur leur retour sans rien partager, beaucoup communiqué sur leur soutien à Bernie Sanders, sur la vie privée de leur chanteur ou sur l’élection de Donald Trump mais qu’en est-il devenu de la musique dans tout ça ?
Constante évolution
Parti de chez Warp pour apparaître chez Sony via RCA, ce disque est déjà pourvu de 4 extraits. Tous plus soutenus dans le tempo et gardant le chant à deux voix alternées ayant fait une partie de leur succès. Une chose incroyable à chaque disque de Grizzly Bear, c’est l’unicité dont il fait preuve. Lorsque l’on est chez eux, nous ne sommes nulle part ailleurs. Ce son aérien, cette complexité si facilement intégrée aux mélodies, ces percussions en sourdine, tout transpire l’orfèvrerie et la méticulosité. Dans ce souci du détail permanent tangible dans toute leur discographie, il est bien difficile de savoir si ce millésime est meilleur que le précédent.
Rythmique folle d' »Aquarian« , « Cut-Out » et sa batterie martiale et martelée, la folie de « Glass Hillside« , Grizzly Bear continue d’essayer des choses inédites pour eux en gardant une cohérence exemplaire. Savoir garder l’intérêt, la qualité et l’expérimentation tout en préservant une vision démocratique de leur groupe. A chaque sortie, ils annoncent que cela pourrait être leur dernière en justifiant ça par la fin d’un cycle et être allé au bout de leurs inspirations. Avec un batteur producteur, un bassiste et un chanteur ayant leurs propres projets, ils font partie de ses rares groupes pouvant aller et venir sans jamais altérer leur base.
Painted Ruins constitue une nouvelle évolution enrichissante de Grizzly Bear. Fourmillant de détails, atmosphérique et plus rythmé qu’à l’accoutumée, il invite à la découverte permanente et renvoie un sentiment de bienveillance et de sérénité que peu de contemporains peuvent afficher. Dans un genre musical qui ronronne gentiment depuis des années, ils sortent donc un disque nous offrant de la pop chiadée (« Mourning Sounds« ), des morceaux dont Alt-J doivent rêver la journée (« Three Rings« ), laisse le micro au batteur (« Systole« ). En sonnant plus groupé que jamais, ils ne délivrent aucun single sans que ça ne pose aucun problème : une preuve de plus qu’on tient un grand album.