OK fin de la mi-temps. Vous avez pu vous reposer ? Bien, parce qu’on enchaine sur un deuxième Hellfest de quatre jours !
Phil Campbell & The Bastards Sons
Comme son nom l’indique, il s’agit du groupe du dernier guitariste de Motörhead Phil Campbell avec ses fils Todd (guitare), Tyla (basse) et Dane (batterie). Ils ont parait-il des chansons à eux mais on n’entendra rien de tout ça. Journée hommage à Lemmy oblige, le set sera constitué uniquement de reprises de Motörhead.
Si instrumentalement ça tient la route, l’ensemble reste un peu propret et il manque clairement une glaire dans le fond de la gorge du chanteur Joel Peters pour que la magie n’opère. Enfin, ça reste quand même un groupe de reprises cinq étoiles et de ce point de vue on est comblés.
Los Disidentes Del Sucio Motel
LDDSM se trainait une réputation de groupe léger plutôt porté sur la déconne. Force est de constater que comme pour leurs collègues de vendredi dernier, ça a changé. Tout de noir vêtus, les dissidents sont venus présenter leur nouvel album spatial « Polaris ». Bon, on n’est pas sur du funeral doom mais le groupe regarde désormais un peu plus du côté du prog. Et si comme ça on pourrait imaginer qu’ils ont troqué leurs bières contre des livres de théorie quantique, rassurez-vous. Les strasbourgeois continuent d’envoyer les buches et obtiennent même un petit circle pit. On apprécie également la communication avec le public et ce moment où ils ont déclaré l’air de rien, être contents de jouer sur la meilleure scène du festival. Les vrais savent.
Slomosa
On avait vu le nom de Slomosa apparaitre en première partie sur les affiches des concerts stoner ces dernières années, mais on ne s’était jamais vraiment penchés dessus. Ils avaient un logo avec un chameau, alors on imaginait bien un groupe sympa sans plus, à rattacher à la branche stoneris stonerus primaire.
Pourtant dès le début du concert, ça accroche instantanément. Les norvégiens ont un véritable sens de la mélodie et plein de petites idées qui les démarquent du reste de la meute.
Mais surtout, les mecs offrent un spectacle super réjouissants en ce qu’ils ont vraiment l’air de prendre plaisir à jouer ensemble. Le chanteur avoue qu’ils n’ont jamais joué devant autant de gens, et d’ajouter un peu plus tard « Dans le village d’où je viens, il y a 250 habitants, et ici… 7000 personnes ? ». On retiendra aussi ce parfait moment où il se goure dans la setlist en lâchant un furieux « This is « Estonia » ! » avant de constater les regards désapprobateurs de ses potes et de se reprendre tout penaud : « No, this one is called « Rice »… ».
Bref, on était loin des vieux groupes blasés en pilote automatique et leur fraicheur faisait plaisir à voir.
Zeal & Ardor
Zeal & Ardor c’est le projet de Manuel Gagneux. Pour vous dresser rapidement l’origine story du truc, parce qu’elle vaut le coup, voilà : Manuel avait l’habitude de poster sa musique sur 4Chan, pour recevoir des retours anonymes et violents. Un jour il crée un jeu : les utilisateurs doivent lui donner des genres musicaux, qu’il devra combiner sur un morceau. Sans grosse surprise, un utilisateur a posé « black metal » et un autre, une saloperie raciste qu’on résumera à « de la musique de noirs ».
A partir de cela il a trouvé son concept : le christianisme a été imposé aux esclaves américains, tout comme il l’a été aux norvégiens, qui en réaction à cela ont créé le black metal dans les années 90. La question est donc : et si les esclaves s’étaient rebellés contre cette religion à l’époque, comment auraient sonné leurs satanic spirituals ?
Zeal & Ardor était déjà passé en 2018 dans une Valley pleine de connaisseurs, mais cette année, la foudre de la hype s’est abattue sur le grand public avec la sortie du très bon éponyme « Zeal & Ardor ». Comme prévu, la Temple est on ne peut plus dense et déborde de partout. Mais surtout, on a là un public très impliqué qui chante et qui fait exactement ce qu’on lui dit. Il suffira que Manuel imite la posture du cornu sur « Baphomet » pour qu’une armée de mains se lève, deux doigts tendus, et reste dans cette position tout le long de la chanson. Tout cela participe grandement à l’immersion. Au final, c’est en live qu’on constate à quel point l’idée improbable fonctionne et qu’on peut très bien faire du call and response sur des blast beats et tremolos pour créer une énergie nouvelle et singulière.
Lowrider
Place à aux vétérans du stoner suédois. Ils sont rejoints sur scène par leur vieux copain, le claviériste Pelle Andersson. Si certains avaient déjà pu l’apercevoir au Desertfest Berlin, il sera cette fois présent du début à la fin du set.
Là où on aurait pu croire que sa présence apporterait à la performance une tonalité plus psyché, on fait pourtant un constat un peu inverse, sûrement la faute à un son assez approximatif (et fort) qui ne fait pas vraiment dans le détail. On se fait donc fougueusement ramoner les oreilles, mais comme on aime ça on ne se plaindra pas trop.
Sólstafir
Si vous attrapez quelqu’un dans la rue pour lui parler de Sólstafir, le mot qui revient le plus souvent est « Hein ? ». Mais mettons que vous attrapiez une personne qui connait effectivement le groupe. Les mots les plus utilisés seront alors « post-metal » et « chiant », suivis souvent de « islandais ».
Parce que oui, d’un point de vue extérieur les mecs semblent échappés d’un catalogue de mode pour hipsters et leurs compositions planantes mais accessibles donneront envie de crier « poseurs ! » à n’importe quel élitiste normalement constitué.
Il faut dire aussi que les amateurs de post se trouvent parfois décontenancés en ce qu’on ne retrouve pas chez Sólstafir la dépression propre au reste de la scène. Non, on est ici sur quelque chose de souvent majeur et de plus lumineux. Et si il y a bien des plans black metal, ils servent toujours à nourrir une émotion plus positive. Paix et amour donc, à la fin du concert on verra même des adultes faire des cœurs avec les doigts.
Hangman’s Chair
Cette année Hangman’s Chair a sorti l’incroyable « A Loner », qui a vu son doom se teinter de cold wave où coexistent déprime et néon. C’est honnêtement un des albums majeurs de 2022 et on était donc impatients de voir ça sur scène.
Au vu de l’album on s’attendait à quelque chose de glacé et d’aérien et… Wow. Ce son. Autant dire qu’on a été surpris. La batterie envoie des patates dans nos estomacs. Les guitariste et bassiste bougent comme à un concert de HxC. Tu croyais venir déprimer ? Ici c’est la bagarre ! Tu croyais que ce serait léger ? C’est massif comme du Conan !
Hangman’s Chair invente la mélancolie offensive. A la fin du set on peut voir dans les regards que tout le monde s’est fait retourner le cerveau. Et si on pensait avoir pris une claque, on était encore loin d’imaginer ce qu’ils allaient nous mettre lors de leur retour en bonne compagnie quelques jours plus tard.
Jerry Cantrell
Le guitariste d’Alice In Chains venait ce soir défendre son troisième album solo « Brighten ». Sur cet enregistrement on comptait entre autres Duff à la basse, mais le guitariste des Guns n’ Roses n’était visiblement pas arrivé en avance juste pour les beaux yeux de Jerry. Par contre, on retrouve bien à sa droite un autre artisan de cette galette, le compositeur Tyler Bates, qui tenait ce soir la guitare. Oh et puis juste à côté de lui, un mec baraqué avec un t-shirt qui lui descend sur le cul, un pantalon en cuir et… pas de doute possible, c’est Greg Puciato !
Que vous ayez aimé « Brighten » ou pas n’aura que peu d’importance puisqu’il se limite à trois chansons, plus trois autres issues de ses autres album solo. Et le reste du set alors ? Dix chansons d’Alice In Chains ! Dix chansons avec Puciato sur les parties de Layne/William ! C’était glorieux. Une fois le concert terminé on quitte le festival sur un petit nuage, sans toucher le sol.