Ce vendredi a permis de distinguer deux types de festivaliers : ceux qui consultent la météo et qui avaient sorti les bottes… et ceux qui pensaient que « allez ça va, ça passe ».
Yarotz
Premier Hellfest pour moi mais pas que puisque j’accompagnais en partie les copains de Yarotz. 3 musiciens dont deux ayant évolué avec General Lee et actuellement Junon. Mais avec Yarotz, Vincent et Fabien, aux côtés d’Enzo à la batterie, n’arrivent pas comme des novices pour autant ! Au contraire, les années d’expérience sur scène vont vite permettre au trio de réveiller le Hellfest et sa scène de l’Altar avec un puissant métal/hardcore maitrisé. Le groupe s’appuie sur un très bon premier LP « Erinyes » qui lorgne sur des sujets d’actualité tels que changement climatique et pression sociétale, pas étonnant donc d’avoir Christian Andreu de Gojira en tant que parrain et guest sur ce premier album. Quoi qu’il en soit, aucun doute n’est permis, le public qui se sera vite massé n’aura pas manqué de saluer l’énorme performance du trio.
As A New Revolt
Tout le monde a oublié One Day As A Lion, le groupe de Zach de la Rocha et Jon Theodore qui a sorti un EP en 2008, puis plus rien. Tout le monde ? Non, pas As A New Revolt !
As A New Revolt c’est deux grenoblois qui jouent du One Day As A Lion core. Les basses sont ultra heavy et l’attitude des deux mecs enflammerait une mainstage si seulement on la leur donnait.
La flemme de Zach est peut-être légendaire, mais elle nous a donné un des plus beaux espoirs français pour ces prochaines années !
Dirty Fonzy
Même s’il est moins renommé que d’autres têtes d’affiches de la scène punk française, Dirty Fonzy sillonne les routes depuis assez longtemps pour être considéré comme des pointures, et leur présence au Hellfest apparaît comme un consécration après le rendez vous sans public de 2021.
Les albigeois sont très heureux d’enfin se produire sur la Warzone, rarement on aura vu un groupe aussi souriant en ce second weekend pluvieux – l’occasion de remercier le public de brave et de faire passer les valeurs du groupe: Humilité, convivialité, partage. La playlist est minutieuse, entre invitations aux sing along (Songs of the Underground, Ok Alright), bombinette hardcore (Overage, Riot in the pit) et respiration mélodiques inspirées (The sky can fall on us). Le final Here we go again en forme de communion cloture ce concert revigorant en présence des bénévoles de l’Xtreme Fest sur scène et en compagnie de Slobodan de l’Opium du peuple, sans doute venu prendre la température pour plus tard dans la journée.
Stöner
Stöner sur le papier c’était une super idée : Brant Bjork et Nick Oliveri allaient se retrouver pour jammer comme les deux bons vieux potes qu’ils sont et le résultat allait donner un nouveau groupe. Bon. En pratique, ça sonne surtout comme du Brant Bjork en solo. C’est simple, répétitif, peu heavy et trop peu psyché pour nous retenir quand notre attention commence à se faire la malle.
Mais c’est un délire de potes, donc pas grave si on ne retient rien des enregistrements, ça doit se vivre en live non ? Oui. Après… l’impression initiale s’est malheureusement un peu confirmée au concert. D’aucuns seront même allés jusqu’à dire que c’était chiant. D’aucuns sont méchants, vous me direz. Oui. Mais d’aucuns sont-ils si éloignés de la vérité ?
Enfin ils ont conclu avec une reprise de Kyuss et personne ne peut rien contre la puissance de « Green Machine » !
Pogo Crash Car Control
C’est fou comme en l’espace de même pas 5 ans Pogo Car Crash Control a acquis le statut de relève de la musique saturée en France. Bon, à titre personnel je suis passé totalement à côté du phénomène mais je dois être le seul dans ce cas dans public de la Warzone, rempli comme rarement pour un groupe français ce week-end. Le mélange rock / punk / metal des quatre parisiens met un bon boxon dans la fosse, les morceaux sont pour beaucoup repris en coeur, la belle insolence affichée fait rugir les nombreux fans: je n’avais pas vu un tel engouement depuis la feu Team Nowhere, avec qui un parallèle se dresse: Porté par une énergie brute et communicative mais pas (encore ?) totalement convaincant musicalement parlant.
Pour ma part, j’avais décidé de zapper Health à grands regrets car je soupçonnais les P3C d’un énorme concert en terres clissonnaises. On sent vite que le concert est attendu tant la War Zone sera pleine à craquer. Autant dire qu’une fois entrée, on n’en sort plus mais en même temps, qui l’aurait vulu. Le quatuor français ayant livré l’une de plus grosses perfomances du week-end sur la scène. Les titres s’enchainent vitesse grand V et les slams vitesse grand S. Un joyeux foutoir aux allures de passage à ne surtout pas manquer façon uppercut dans la gueule malgré un passage dén début d’après-midi.
Danko Jones
Le public est salement clairsemé quand on arrive devant la Mainstage 2 pour voir Danko Jones. On avance, on avance, on avance, puis on arrive au bout. Parce qu’il n’y a presque personne. Quoi qu’il en soit, Danko est toujours le roi du rock n’ roll et ses tubes toujours aussi efficaces. Mais surtout, c’est toujours cet énorme showman qui pourrait tenir un concert sans commencer à jouer, sans qu’on en parte mécontents. Au cours de ses 45 minutes il aura eu le temps de se foutre gentiment d’un photographe dans le pit photo, de nous expliquer que si on bouge pas c’est seulement parce que son groupe ne s’épanouit qu’après la troisième chanson, de nous avouer qu’il a oublié la chanson suivante et de faire un blague aux gens accrochés à la Mainstage 1 juste à côté. La blague : crier très fort pour qu’ils se retournent et croient qu’il vient de se passer un truc de fou. Ironique, parce qu’effectivement, il se passe quand même un concert de Danko Jones et on dirait qu’une bonne partie du festival a oublié de venir. Mais c’est pas grave, les hymnes rock n’ roll sont là alors on sautille et on chante comme devant une tête d’affiche.
Il nous laissera tout de même avec ce bout de sagesse digne d’une impro d’un standupper : il parait qu’il va bientôt pleuvoir et que si la pluie est plus metal et le soleil plus rock n’ roll, lui s’en fout parce qu’il est aussi metal que rock n’ roll. Tout juste, tant sur la métaphore cheesy que sur la météo puisque quelques minutes plus tard on commence à se prendre des gouttes.
Opium du peuple
Connu pour ses reprises de standard de la variété française reprise à la sauce punk, le groupe d’origine albigeoise s’est largement étoffé par rapport à ses débuts en intégrant 2 chanteuses en électron libre et même récemment Ed – ex chanteur guitariste de Uncommonmenfrommars. A la formule Me First and the Gimme Gimmes à la française se rajoute une grosse couche de mise en scène, de changements de costumes et de chorégraphie, allant de la simple interaction avec le public (Le tourbillon de la vie repris façon Nellie the Elephant des Toy Dolls) à la production grandiloquente (Fais moi mal Johnny qui a impliqué un bâillon-boule, des culottes rouges apparentes, des juste au corps en cuir, et des feux d’artifice qui sortent des tétons).
Ce n’est pas un concert auquel on assiste sur la Warzone, mais plutôt à un spectacle de cabaret barré donné par Opium du Peuple et force est d’admettre que cela s’accorde bien au décorum imposant du Hellfest. La petite troupe nous quitte à après un RockCollection remixé à la sauce métal citant Metallica, Motorhead, AC/DC, Pantera et Slayer.
A. A. Williams
Il est 17 heures mais l’ambiance est déjà crépusculaire quand commence le concert d’A. A. Williams sous la Valley. Si beaucoup l’on découverte grâce à ses reprises de confinement, c’est bien à un concert de son propre répertoire auquel on aura droit. Les instruments sont électriques, mais les morceaux restent aérés et dépouillés. De formation classique, Williams a longtemps joué du piano puis du violoncelle, avant de découvrir le metal. Ceci se ressent surtout dans les phases les plus calmes qui rappellent presque Agnes Obel, et disparait quand le son se fait plus amplifié pour aller chercher du côté du post-rock. Un épais brouillard recouvre rapidement la scène et on finit enveloppés dans cette sombre barbapapa cotonneuse.
Killing Joke
Killing Joke revient pour son deuxième concert du festival, cette fois sur la Mainstage. C’était malheureusement prévisible, sur une grande scène de jour la magie opère moins que sur une petite la nuit. Le public est aussi bien moins motivé et même si ça ne devrait pas compter, ça compte un peu quand même.
Côté setlist c’est la même chose que dimanche dernier mais dans le désordre et avec quelques ajouts. Chaque concert de Killing Joke reste une célébration et on ne boude donc pas notre plaisir. La frustration sera d’ailleurs grande quand on sera obligés de partir sur « Loose Cannon », la faute à un cruel running order qui fait commencer le set de Godflesh avant la fin de celui de Killing Joke.
Godflesh
Les deux compères de Godflesh entrent sur scène tout discrètement mais on remarque déjà un Justin Broadrick au max de sa pilosité et équipé de son plus offensif short de guerre. Ils ne sont clairement pas là pour déconner et le premier coup de massue arrive dès que retentissent les premiers beats de la massive boite à rythme. L’assaut est aussi violent qu’inexorable. Godflesh entre dans nos tympans pour réduire l’intérieur de nos boites crâniennes en bouillie et lorsque le « Streetcleaner » se fait enfin entendre c’est toute la tente qui vibre à la fréquence de la chaire de dieu. Les deux musiciens restent en place et le spectacle se fait finalement grâce aux visages grimaçants projetés sur l’écran en fond de scène. Alors qu’on est en pleine journée indus sur la Mainstage, les guitares les plus lourdes et les plus denses étaient sous la Valley.
Earth
Au moment où commence le concert de Earth ça fait déjà une petite heure que des torrents de pluie se déversent sur Clisson. La tente est donc pleine de réfugiés climatiques qui profiteront du set des olympiens, qu’ils le veuillent ou non. Dylan Carlson est sûrement allé voir Killing Joke puisqu’il a décidé de piquer l’idée de Jaz Coleman et de garder ses lunettes de soleil tout le concert. Certaines choses ne changent pas : côté élocution il est à peu près aussi compréhensible qu’Ozzy lorsqu’il s’adresse au public. Enfin avec Earth c’est surtout la musique qui parle. Les longues notes sont accompagnées des grands gestes amples de la batteuse Adrienne Davies. Malgré quelque soucis techniques la séance d’hypnose prend plutôt pas mal.
Earth est l’exemple même du groupe au délire jusqu’auboutiste. Ceux qui sont rentrés dedans étaient ravis, les autres étaient juste contents d’être au sec.
Nine Inch Nails
Cela fait maintenant plus de trois heures qu’il pleut en continu et des légions d’enkawettés se dressent fièrement face à la météo, parce qu’on ne rate pas un concert de Nine Inch Nails, et encore moins celui-là.
Trent Reznor était à l’origine plutôt opposé à l’idée et Ben Barbaud aura dû voyager pour aller le courtiser en personne et lui promettre de composer son petit festival à lui. Ce vendredi, les groupes de la Mainstage 1 ont été choisis par le Maître. On aurait d’ailleurs eu Skinny Puppy si leur tournée européenne n’avait pas été annulée. Le Hellfest est donc venu clôturer une mini-tournée de cinq dates anglaises, sur laquelle on ne compte aucun festival. Ce concert est donc un petit événement. Le groupe a d’ailleurs marqué le coup avec deux t-shirts NIN x Hellfest aux visuels aussi drôles que satanistes.
On est donc sous la pluie avec de grosses attentes quand les écrans de la Mainstage s’allument et que les premières notes de « Mr. Self Destruct » nous explosent au visage. Non seulement ça sonne très bien, mais c’est aussi épais que violent. Le teasing n’était pas vain et leur ramage se rapporte bien au plumage promis : ce soir on casse des bouches et des tympans. Le reste de la setlist sera à l’avenant avec tout de même : « Heresy », « Burn », « Gave Up »… Sur scène, Trent Reznor a clairement l’air de vouloir en découdre. On croyait que le départ de Trump allait le rendormir, c’est tout le contraire. Il est plus énervé que jamais.
Les écrans sur les côtés de la scène retransmettent des images noir et blanc de caméras qui s’agitent dans tous les sens, accentuant un peu plus le sentiment de malaise/violence. Si vous étiez au fond, vous n’avez sûrement pas vu grand-chose mais l’effet était incroyable.
Enfin, et c’est ce que beaucoup retiendront du set : les musiciens de Health qui jouaient plus tôt cet après midi sont montés sur scène pour interpréter « Isn’t Everyone », pour la première fois en live.
Le Maître refusait de venir au festival à moins de pouvoir livrer quelque chose de spécial. Mission accomplie. On se souviendra longtemps du concert de Nine Inch Nails au Hellfest.