Une année s’est écoulée depuis le dernier passage (remarqué) de Julien Baker dans la capitale. Entre temps, la demoiselle aura connu un essor certain et, voguant sur les eaux du succès, sortira un second opus, Turn Out The Lights.
Un album tout en finesse qui confirme son talent et que Julien viendra défendre en cette nuit de novembre.
Turn up the lights
Sortez les mouchoirs
Malgré la gravité de la soirée (ose me dire que tu n’as pas songé au paquet de mouchoirs), les sourires sont de mises entre les chansons, entre soulagement cathartique, communion heureuse et timide admiration. Car Julien, du haut de ses 22 ans, sait toucher en plein cœur avec ses chansons qui racontent les côtés les plus sombres de nos vies. Son dernier album approfondit la thématique du premier, entre rédemption, foi et quête d’amour. Tous les soirs, elle chante sa mélancolie et pourtant, la sincérité semble intacte, comme au premier jour.
Au fur et à mesure que le concert avance, on sent que Julien se perd dans les méandres de ses mélodies, déroulant ses paroles comme un besoin viscéral de tout faire sortir, encore et encore, peut-être dans l’espoir que quelqu’un enfin réponde à ses questions et ses doutes. Everybody Does fait vibrer notre corde sensible, on gagne encore en intensité avec Red Door (titre inédit) mais c’est Shadowboxing qui marque le « turning point » de la soirée : comme une dernière supplication, Baker s’éloigne du micro pour crier les dernières paroles, « So tell me you love me/ Tell me you loved me/ I wanted so bad/ I wanted so bad to believe you ». On entre dans une dimension presque mystique où Julien serait notre phare dans la nuit.
God, I don’t wanna go home
La demoiselle enfourche alors son piano, entonne les accords de Televangelist, et sort d’outre tombe « My heart is gonna eat itself« . La chair de poule est instantanée et les yeux, humides. L’enchaînement avec Hurt Less et Go Home sera fatal à la salle, et après avoir retenu son souffle, gorge serrée, un long soupir parcourt l’assemblée à la fin de cette dernière, comme si nous sortions tous d’un moment particulièrement éprouvant. J’ai le cœur lourd et une furieuse envie de me mettre en PLS au fond de la salle. Pourtant, j’applaudis à m’en faire mal aux mains.
Le concert aurait pu terminer sur cette note, mais Baker maîtrise son set et sort la classique Something. Pour cette dernière ronde, le public se joint franchement à la fête et accompagne Julien comme d’un seul homme. Avec un dernier petit sourire et sous un tonnerre d’applaudissements, la songwriter quittera la scène sans faire de rappel, mais laissant sur le carreau le théâtre des Etoiles.
On pourrait chipoter en disant que l’une des forces de Turn Out The Lights, à savoir l’addition de cordes, manquait quelque peu dans ce live (Julien ayant été accompagnée par une violoniste lors de la tournée américaine). Mais au final, n’est-ce pas ce dépouillement total qui va le mieux à Julien Baker ? Dans tous les cas, la sincérité et la finesse furent de mise et difficile de ne pas ressortir conquis (et un peu déprimé) de cet exceptionnel live.
Setlist :
Over
Appointments
Funeral Pyre
Sour Breath
Sprained Ankle
Everybody Does
Red Door
Shadowboxing
Rejoice
Turn Out the Lights
Televangelist
Hurt Less
Go Home
Something
Remerciements à Anne de Super! et Sébastien de Beggars.