Les deux éditions de leur Block Party au mois de mai 2023 et 24 ont inspirés les équipes du Supersonic à passer leur soirée They’re Gonna Be Big au format festival de 3 jours. Le Club, le Records et la Seine Café accueillaient pour la première fois à Paris une vingtaine de groupes entre le 22 et le 24 octobre avec une programmation variée et pleine de surprises puisque la plupart des artistes présents n’ont pas encore de premier album en stock. Une semaine plus tard, c’est l’heure du debrief et des coups de coeurs.
Quel plaisir de ne pas avoir vu le coup venir. Si sur album la formule funky et chill des PleasureInc. nous parlait, on ne pouvait pas se douter de tels capacités de performers. Fun dans l’accoutrement et l’attitude, il fallait les voir pour se rendre compte de leur aisance sur scène. Solo de guitare impromptu, claviers épileptiques, trois chanteurs qui se renvoient la balle en fonction du morceau. Ce n’est pas un concert mais un numéro d’équilibriste. A l’image des Adult DVD lors de la Block Party 2024, ce sont peut-être eux qui ont volé le show et qui ont sans aucun doute signé le set le plus cool des 3 jours.
En fin de première soirée, on sent une effervescence dans le public. Il semblerait que le fils de Liam Gallagher soit parmi nous. Pas là pour parler tarification dynamique des billets ou de l’entente retrouvée entre son père et son oncle, il est le guitariste des Automotion. Et pour en finir avec la génétique, difficile de ne pas reconnaître les sourcils généreux du paternel lorsque l’on sait d’où il vient. Bref, la musique démarre et les yeux s’écarquillent dans l’assemblée. Ce n’est pas parce que la dernière bière a un drôle de goût mais grâce à un son musclé. Entre rock mélancolique et shoegaze, le groupe en impose. Pendant une vingtaine de minutes. Avant de s’essoufler peu à peu à force de compliquer des titres qui n’en méritaient pas tant. On est par contre curieux de voir comment se déroulera la suite de leurs histoires et de savoir où le groupe souhaitera mettre le poids du corps dans ses compositions.
Si l’on veut entendre les cloches du Père Noël, il valait mieux porter des bouchons à la fin octobre dans la cave du Seine Café. Voir les membres de CRACKUPS se marrer devant le bar avant de jouer, c’est un indice de moins pour deviner les vilains bougres qu’ils sont une fois leurs instruments. Tout comme son nom écrit en CAPS LOCK, leur musique hurle et crie sans temps mort, ni longueur puisque la majorité des chansons se plie sous les 2 minutes. C’est aussi sans concours possible, la batterie la plus incompréhensible qu’il nous a été donné d’entendre depuis un bail. Avec pour résultat, un rythme si frénétique et assourdissant qu’on s’étonne à voir les membres du public tendre la tête et le coup pour essayer de voir comment le batteur peut produire un son pareil.
Si le Supersonic est connu pour un lieu rock sous toutes les formes, ce n’est pas pour autant qu’il se limite à ce style. En tête d’affiche de la soirée la plus éclectique, les Monster Florence ont éclaboussé ce mercredi de leur maîtrise. Dans ce que l’on pourrait décrire comme un mélange improbable de Gorillaz et Run The Jewels, on a tout aimé chez eux. La bonhommie, le touché des musiciens, le style bien distinct de chaque rappeur et l’ambiance qu’ils ont mis dans le public. Véritables doyens de la programmation avec 4 albums en banque, c’était un privilège de pouvoir les voir dans un cadre comme celui-ci.
On se souviendra longtemps de la fois où on a vu des personnes déguisées en apiculteurs ou sapées en doudoune/cagoule sur une scène de concert. Tantôt conte pour enfants, tantôt comédie musicale sous pilules, ce show de Bumble B Boy est exceptionnel. Au sens premier du terme. C’est une exception qui contient des passages hilarants, un niveau de jeu de musiciens parfois délirant et de grands moments de questionnements. Comme une fusion de Black Country, New Road et de Crack Cloud par moments que l’on regrettera de ne pas avoir jouer cartes sur tables en s’appelant Bee Country, New Crack. En tout cas, merci pour les rires : ils étaient francs, incontrôlés et sincères.
Voir un artiste en live, c’est être surpris du rendu et avec Pop Vultures, on n’a pas été déçus. A mettre du côté des récents Folly Group, il dégage de cette formation un certain sens de la détente qu’on pensait sur scène comme de bons slackers/branleurs. Il n’a pas fallu plus de deux minutes pour comprendre que le chant serait scandé, voire hurlé, que les guitares seraient stridentes et les fûts secoués. Placé tout en haut de notre liste des attentes du festival, ils ont tenu leur statut même si on aurait préféré les voir au Club.
They’re Gonna Be Big, ce nom qui sonne comme une promesse. Certains le deviendront plus que d’autres. Hormis une technologie qui laisse à redire pour les blinds tests démarrant chaque journée*, nous n’avons encore que des compliments à dire sur cette initiative qui vient nous étonner par la diversité des groupes et nous surprendre par sa qualité d’organisation et sa soif permanente de découverte.
*Mauvais joueur un jour, mauvais joueur toujours.