Les années passent et la mode des bilans ne semble pas s’arrêter. Par contre chez nous pas de classement, juste les noms. Un article par catégorie : albums, chansons, concerts, news et une playlist pour s’y retrouver. Commençons par le plus important, les disques de l’année.
2022 a été le grand retour d’une année pleine côté tournées. Ce qui a eu pour déclic automatique de débloquer tous les albums écrits pendant la pandémie, de rallumer enfin les tournées mondiales et la présence en festivals. Nouvelles pousses sorties de nulle part, disque de la confirmation pour d’autres, toujours autant de groupes en provenance d’Angleterre et aussi de belles choses venant de… France ! Si les mastodontes à la QOTSA, NIN se font toujours aussi rare en studio, il fallait être sourd pour ne rien avoir à écouter cette année.
DITZ – THE GREAT REGRESSION
Les enragés de Brighton ont déboulé avec ce disque comme un bot dans tes DM Instagram. Sans prévenir et avec une confiance démesurée. Ce projet labelllisé comme étant le nouveau groupe préféré de Joe Talbot des IDLES et invité par METZ à ses premières parties est parvenu à marier un sévère penchant agressif avec une faculté à pondre des tubes les plus immédiats et accrocheurs. Il est encore impossible de déterminer quel est le meilleur morceau de ce disque mais il est si simple de comprendre pourquoi leur folie, leur son et leur attitude font de ce premier album l’un des immanquables de l’année. Il ne nous manque plus qu’à ENFIN les voir en live.
NILÜFER YANYA – PAINLESS
Découverte lors de l’impeccable émission Echoes, Nilüfer Yanya nous a cueilli par l’écoute de ‘Midnight Sun‘ que ce disque s’est immiscé dans notre mois de mars sans jamais quitter nos oreilles. L’émotion de ce disque de rupture, c’est à choisir la voix voilée de son interprète, son génial son de guitare, cette batterie jazzy toujours là quand il faut et ses références sonores à Adore des Smashing Pumpkins ou à In Rainbows de Radiohead. Mais ne limitons pas cet album si personnel à une simple somme de références…
Une ode aux repeats et une emprise qui fonctionne du premier au dernier titre, histoire d’en rajouter une couche sur la pertinence du format album en 2022.
FONTAINES D.C. – SKINTY FIA
Tout a commencé par ‘Jackie Down The Line‘, single implacable du début janvier qui semblait annoncer que quelque chose avait changé pour les Dublinois les plus en vue depuis U2. Bien plus qu’un single, ce troisième album est la confirmation d’un groupe qui a digéré son succès tout en trouvant un son et une interprétation qui les place aujourd’hui en haut du rock mainstream de qualité. Grâce à une production sonore d’un coffre soufflant et d’une clarté étincelante, Skinty Fia est lui aussi un vrai album et mérite d’être découvert et apprécié dans sa totalité.
Reste cet horrible titre à l’accordéon, que l’on n’aura pas écouté plus de deux fois. Faut pas pousser.
PHOENIX – ALPHA ZULU
Même constat que le groupe précédent : comment garder consistance, cohérence et aisance après 25 ans d’existence ? Après s’être fantasmé une Italie avec Ti Amo, Phoenix a composé à distance et est revenu dans une certaine mesure à Wolfgang Amadeus Phoenix pour son sens de la percussion et une mélancolie attachante dans les thèmes et les paroles. On apprécie aussi que les effets sur la voix de Thomas Mars se sont calmés pour retrouver ce grain de voix caractéristique et la fragilité qui va avec. Démoniaques sur scène et accompagnés d’une magnifique scénographie étourdissante et aveuglante, Phoenix va régner sur 2023 et Alpha Zulu complète parfaitement l’excellente discographie des meilleurs représentants de la pop aujourd’hui.
BIRDS IN ROW – GRIS KLEIN
Il est toujours plaisant de voir un groupe français dépasser les frontières de l’hexagone. Et si le trio n’a pas encore la réputation d’un Gojira, c’est très certainement lié au genre musical de punk hardcore moins mass media que le métal (déjà pas toujours très mass media). Mais que dire de cet album si ce n’est qu’il s’agit d’une belle réussite ? Certain(e)s regretteront le côté brut des premiers albums mais Birds In Rows avaient calmé tout le monde avec un double single de feu « Noah / Cathedrals », « Gris Klein » finira par révéler qu’il contient tout autant d’énormes titres à se jeter dans les oreilles volume au max (« Confettis », « Grisaille »). Ajoutez à cela des performances live bien vénères et vous obtenez un des albums de l’année à écouter et à voir. (Pas pour rien que Cult Of Luna continue de faire la promo des français).
HEALTH – DISCO 4 PART II
HEALTH reste assez inconnu du grand public français et pourtant le groupe figurait bien sur la liste des conditions indiscutables de Trent Reznor si le Hellfest voulait épingler Nine Inch Nails sur son édition 2022. Quand le Maître se porte caution, on se doute que ce n’est pas pour rien ! Health s’appuie aussi sur une liste d’invités démentiels sur son « Part II » allant du Maitre Reznor à Lamb Of God en passant par Perturbator, Ho99o9 ou encore Street Sect pour des titres allant du rock électro / dark wave au rock des Enfers ou encore l’ambiant. Fou, divers, on revient d’autant plus sur les deux parties de « Disco 4 » en voyant la liste globale des invités venus poser leur touche sans trahir pour autant le son même de l’entité initiale. Une belle réussite.
THE SOFT MOON – EXISTER
Luis Vasquez est revenu avec un album cathartique « Exister », qui rappelle à quel point l’artiste est humain. Et si l’album de The Soft Moon ne se révèle pas immédiatement, c’est parce qu’il est à l’image de son concepteur, l’artiste se livre ici au fur et à mesure de titres parfois lumineux (« Become The Lies ») mais aussi parfois plus sombres (« Nada ») pour offrir un album de dark wave comme on les aime. Finalement, on ne connait une personne qu’en passant du temps avec elle, en discutant avec elle et bien cet album, c’est l’humain Luis Vasquez dans toute sa splendeur. Un album nécessaire pour son auteur qui aura exorcisé de nombreuses choses, mais aussi pour les auditeurs à la recherche d’un album pétri d’authenticité musicale. Pour en savoir encore plus sur le groupe, notre interview est là.
CHARLOTTE ADIGERY & BOLIS PUPUL- TOPICAL DANCER
Jamais en overdose de son issu de l’usine à tubes Soulwax, quel plaisir de découvrir ce projet aperçu pour la première fois en première partie de Young Fathers au Badaboum un soir d’avril 2018. Si le disque Topical Dancer collectionne les qualités par ses paroles, son sens de l’humour et son esthétique, on préférera encore plus la version live. Grâce à la présence scénique irradiante de son interprète, l’alchimie entre les deux et l’irrépressible envie de danser du show feel good de l’année au Trabendo en mars dernier.
MANTAR – PAIN IS FOREVER AND THIS IS THE END
A chaque livraison Mantar raffine un peu plus sa formule mais celle de 2023 a ceci d’important que ça y est : c’est officiellement devenu de la drogue. Et pas n’importe laquelle, celle qui en une écoute enverra ton pote sage tout au fond d’un squat dégueulasse. « The Modern Art of Setting Ablaze » avait démontré leur capacité à ciseler des tubes dépressifs, et ce nouvel album pousse la performance encore un cran plus haut.
On sait que l’accouchement a eu lieu dans la douleur après des remises en questions qui ont presque mis fin au groupe. L’amertume de ces années se ressent à l’écoute. Aussi on hésiterait presque à leur crier à quel point ils sont glorieux.
BRUTUS – UNISON LIFE
Les confinements successifs ont donné à Brutus l’occasion de se pencher sur tous les aspects de son son et le résultat est incroyable. Loins de tuer l’énergie punk écorchée du trio, ces effets plus raffinés lui donnent une profondeur qui offre aux compositions une puissance décuplée. Le chant de Stefanie passe aussi un cap. Elle gagne une énorme amplitude tout en continuant de nous donner l’impression qu’elle est en train de s’arracher le fond de la gorge. Si on ajoute à cela des paroles plus honnêtes que jamais, il se dégage de l’ensemble une authentique sincérité.
Et si les montées en puissance post restent leur marque de fabrique, le morceau le plus fort reste le plus simple : « Victoria ». Oui, parce que par-dessus tout ce qu’on vient d’énoncer, Brutus se paye aussi des refrains imparables qui restent bien gravés dans le cerveau. On ne va pas s’en plaindre, c’est un des meilleurs albums de l’année.
GGGOLDDD – THIS SHAME SOULD NOT BE MINE
« This Shame Should Not Be Mine » a été composé pendant un confinement et il en ressort une prééminence des machines et un côté assez dépouillé qui diffère fortement de ce qu’avait auparavant pu produire GGGOLDDD.
Avant d’être un album, il s’agissait d’une performance pour le Roadburn Redux. On ne va pas vous refaire toute l’histoire, elle est là, mais il s’agit d’un album important. Quand le groupe a repris la route cette année pour interpréter les morceaux devant un public, l’émotion était palpable et le résultat poignant.
MESSA – CLOSE
Au vu des éloges qu’ils ont reçues pour « Feast For Water », on aurait pu croire que Messa avait trouvé sa formule et qu’ils allaient passer en pilotage automatique. Que nenni ! La formule à peine trouvée, les italiens cassent le moule et envoient voler le clavier Fender Rhodes qui commençait à les définir. Et l’étiquette doom-blues qui s’était changée en étiquette doom-jazz finit par entièrement se décoller quand « Close » va chercher de multiples influences orientales et se permet même un passage flamenco.
Ils étaient attendus au tournant et ils ont fait un demi-tour. « Close » est un des albums les plus intéressants de 2022.
WARHAUS- HA HA HEARTBREAK
En novembre lorsque certains ne font plus attention et ont déjà la tête à l’année qui vient se pointe souvent quelques pépites oubliées des tops. Warhaus en fait indéniablement partie. Album de rupture à la production chiadée, cette troisième envolée de Marteen Devoldere en dehors de Balthazar est un grand chelem. Entre pop et soul, on aime sa chaleur, sa générosité et les sonorités que l’on découvre au gré des multiples écoutes. Un disque qui gagne avec le temps et déploie son emprise doucement mais sûrement.
Pour en savoir plus sur le projet, notre interview est là pour t’éclairer.
EDDIE VEDDER – EARTHLING
Un album lancé par accident après une répétition chez le producteur Andrew Watt, ou quelques accords ont fini de fil en aiguille à la confection d’un album solo. Watt fan de Pearl Jam depuis l’enfance, réalise un rêve et monte un supergroupe : Eddie et ses potes (Chad Smith, Josh klinghoffer et Glen Hansard, plus tard sur la tournée…) Un album un peu rockollection des influences de Vedder, de l’americana, en passant par la pop, jusqu’au rock/ punkrock et aux balades : on y « entend » Tom Petty & Bruce Springsteen, les Beatles, les Ramones… et en profite pour inviter les légendes des années 60/70 (Stevie Wonder, Elton John & Ringo Starr). Des titres n’auraient pas dénotés sur un album de Pearl Jam.
THE LUMINEERS – BRIGHTSIDE
Malgré un album très court, The Lumineers nous délivrent encore un album comme ils savent si bien le faire, des mélodies vocales qui donnent envie de chanter chaque refrain de chaque morceau ! Et donner envie de chanter a l’auditeur est la marque d’un album réussi !
MIRANDA LAMBERT – PALOMINO
8e album de la superstar de la country américaine, Miranda Lambert ne s’est endormi sur ses lauriers et livre un album d’une country teintée de soul, gospel, blues et Southern rock ! Des compositions issues la période « quarantine » qui font voyager l’esprit à travers les États Unis quand le corps n’avait pas le droit ! Miranda a déclaré que faire cet album était l’expérience la plus fun et creative de sa carrière et cela s’entend !
MARREN MORRIS – HUMBLE QUEST
Le 3e album de Maren Morris est bien plus ambitieux que son titre ne le suggère. Apres avoir participé au supergroupe The Highwomen, elle se devait de confirmer son statut. c’est chose faite avec cet album qui est une expression presque parfaite de la country-pop. Façonné avec l’aide de Greg Kurstin (Foo Fighters, Adele, Liam Gallagher), 11 chansons sur l’amour, le travail et la famille, certaines excellentes, d’autres bonnes, avec une cohérence et une clarté qui en font un album magistrale.
Sortis cette année au cas où : Dry Cleaning, Blood Red Shoes, Working Men’s Club, Yeah Yeah Yeahs, The Smile, Bloc Party, Jack White (x2), Red Hot (x2), Beach House, Zeal & Ardor, Bodega, Wet Leg, Pogo Car Crash Control, Yard Act ou encore LS Dunes.
On ne va pas passer 10 paragraphes à rager sur des albums que nous n’avons pas compris mais faisons la liste des cuvées 2022 qui n’ont pas été à notre goût.
- Interpol confiné au rythme ralenti, qui n’a jamais vraiment pris le second souffle attendu…
- Les Foals qui décident d’ambiancer les pistes de dances mais qui oublient de se renouveler.
- Un Father John Misty pris au piège d’un album orchestral ronronnant en laissant de côté le sel habituel de son interprétation et de ses paroles.
- Dry Cleaning, devenus un peu trop abstraits dès leur deuxième disque.
- Billy Corgan, pardon les Smashing Pumpkins qui lance leur projet ATUM de la pire des manières en pondant leur plus mauvais disque en carrière. On vous conseille l’écoute d’Hooray pour vous marrer un bon coup.
- Le retour de The Mars Volta qui se solde par une tentative pop, risquée mais plombée par une production transparente.
- Metric et son disque pas du tout funky.