Il est toujours amusant de voir des inconnus réussir là où des noms fameux se sont cassés les dents. Prenez Billie Joe Armstrong: Fort du succès de ‘American Idiot‘ et persuadé d’être un fin songwriter, il décide de se remettre la musique des 60’s au gout du jour avec ses compères de Green Day dans le cadre du side project Foxboro Hot Tubs. Malheureusement pour lui, l’album qui en résulte peut être vu au mieux comme un hommage maladroit, au pire comme un plagiat éhonté de The Kinks.
C’est là qu’intervient The Gaslight Anthem. Alors qu’on attend au lance-flammes tout groupe de rock/punk se réclamant des mêmes influences que Foxboro Hot Tubs, ce groupe américain venu de nulle part pose sa pierre et séduit sans peine les auditeurs les plus récalcitrants (dont votre serviteur fait partie). Comment font-ils pour s’en sortir, alors que l’exercice semble des plus casses-gueules ? En fait, The Gaslight Anthem joue sur le fait que les apparences sont trompeuses. Réduire ‘The ’59 Sound‘ à un tribute album apparait rapidement impossible: Si ‘Great expectations‘, ‘Casanova, baby !‘, ou même ‘Film Noir‘ fleurent bons les épisodes de Happy Days, le reste de l’album recèle de touches modernes et bien plus judicieuses. ‘Old White Lincoln‘ sonne bien souvent comme un titre The Cure (un bien bon, de surcroit). En écoutant ‘Miles Davis & The Cool‘, on se dit qu’on a enfin trouvé les mecs dont s’inspire Chris Martin pour écrire les 3-4 chansons rythmées du répertoire de Coldplay. Sur de nombreux titres, le tempo énergique et les choeurs rappellent les facéties juvéniles d’un Weezer.
‘The ’59 Sound‘ se veut résolument mainstream. Les mélodies sont d’une efficacité redoutable, et les compositions se retiennent facilement. The Gaslight Anthem n’invente rien, mais digère ses influences avec brio. Avec la reverb permanente sur la voix sur chanteur, on se dit aisément que l’album est plus adapté pour être joué dans un stade que dans une petite salle. D’ailleurs, le groupe n’évite pas quelques écueils inhérents aux albums dits ‘grand public’, à savoir la balade langoureuse avec la guitare made in Carlos Santana derrière (‘Even cowgirls get the blues‘), la surenchère grossière pour le dernier titre de l’album (‘The Backseat‘) et surtout un son très produit qui lisse toute forme d’aspérité. A titre personnel, la musique de stade, de The Police à Oasis, ne me dérange pas, tant qu’elle fonctionne. Et à cet égard, The Gaslight Anthem s’en sort très bien, se permettant même une très jolie incursion folk sur ‘Here’s loojing at you, kid‘ qui n’aurait pas fait tache sur un album de Bruce Sprinsteen. Si Bono et The Edge pouvaient jeter un coup d’oeil sur ce que font ces 4 américains, peut-être qu’on grimacerait moins à chaque annonce de sortie d’un nouvel album de U2.