Délicat et charmant, From Speaking Parts To Blazing Rows annonce le retour de Léo(88MAN) en bonne et due forme. Dix titres assez épatants du folkeux du Nord, qui trahit sa position géographique davantage par sa proximité musicale avec la maudite Angleterre que par son accent ch’ti. Nulle trace de franchouillardise acoustique faussement américanisée ici. Léo(88MAN) est un orfèvre, un artisan mélancolique et posé des cordes à peine effleurées.
Dix titres, et autant d’énigmes. Insaisissable, cet album se dérobe aux oreilles : attrape ton anguille à mains nues. On s’accroche à quelques références pour ne pas sombrer dans le mystère : on pense à Jil Is Lucky (‘Locked Groove‘, ‘Dry Out‘), à Sonic Youth, qui aurait décidé subitement de jouer dans ton salon sans perdre un petit brin de disto pertinent (‘Speaking Parts‘), à du shoegaze soft et sans perturbations aériennes (‘Di Corsa‘), et même au groove acoustique et oriental d’Interzone (‘Typing Paper‘). Au fur et à mesure, on se demande même si Léo(88MAN) ne serait pas le pendant lumineux de The Healthy Boy, avec cette douceur triste et vivante.
Mais bon, le voyage en terre folko-pop ne s’avère pas être davantage coloré. Si on sent de jolies influences de-ci de-là, on finit par s’ennuyer dans le monde bleuté de Léo(88MAN). Certains titres ont le malheur de se ressembler, et ça ne pardonne pas quand on a une voix aussi tendre qui laisse traîner ses mots sur quelques guitares fragiles. ‘Surrounded By Ideals‘ et ‘Make Tracks‘ forment un doublon légèrement soporifique, et on commence à cerner franchement le tableau sans qu’on sorte très surpris au final.
Trop doux peut-être, Léo(88MAN) a au moins le mérite d’assumer un univers éthéré, musicalement réussi, mais plutôt bâti pour les nuits solitaires.