On le lit un peu partout en interview et dans la presse spécialisée : il s’agirait pour Tricky d’un retour aux sources et on ne fait que comparer cet album à son premier effort Maxinquaye. Cet album révélateur d’une époque et précurseur est et restera la pierre angulaire de la discographie de l’ex Kid de Bristol pour beaucoup.
Et pourtant, même si on retrouve sur cette galette beaucoup de titres downtempo dans une pure veine trip hop que Tricky semblait presque avoir oubliés sur ses derniers albums, on ne retrouve quand même ici que par moment la magie des débuts : Valentine avec son sample de Chet Baker et sa rythmique tribale, Passion of the Christ ou I’m ready sont de parfaits exemples de la réussite dans cette réminiscence et relèvent le niveau de certains errements plutôt R’n’B (Nothing matters assez mauvais).
Autre point clairement différent : si le tempo est souvent lent , on peine parfois à retrouver le charme poisseux de Maxinquaye et surtout les géniales expérimentations (ça sent quand même trop le pro tools par moments) et les moments volontairement troubles qui faisaient de Pre millenium tension ou Angels with dirty faces des albums plus intéressants que le « chef d’oeuvre » systématiquement cité quand on parle du Bad guy de Bristol. D’ailleurs même si Tricky se plaît à raconter ses exploits passés de délinquant et à taper sur Massive attack en interview, il ressort quand même de ce False Idols par moments un côté consensuel un peu dérangeant, les paroles étant par exemple moins empreintes de rage et de tourments. On finirait presque par le préférer dans son statut d’artiste incompris aux albums moyens de ces dix dernières années plutôt que de livrer l’album que tout le monde attendait de lui. Et les moments les plus rocks de l’album n’atteignent pas forcément non plus la consistance d’anciens titres lourds. Ainsi Parenthesis avec la contribution du chanteur de Antlers pourrait presque passer pour une expérimentation de Muse et Does it sonne comme du faux gros bras sous testostérone, on est loin de Money greedy ou Bury the evidence.
Alors même si l’on peut parler de semi déception (les nouvelles voix choisies n’apportant rien par rapport au lot de chanteuses ayant déjà collaboré sur les précédents disques), finalement après plusieurs écoutes, il ressort de ce False Idols quasiment le même constat qu’à l’écoute du dernier Bowie. Un mot résume cela : la maitrise (et si le clin d’oeil au passé n’est pas évident sur la pochette comme chez Bowie, les adeptes retrouveront ça et là certains lyrics de Pre millenium tension que Tricky ré-incorpore régulièrement en live dans d’autres morceaux). Car même si l’on sait que l’industrie musicale, que notre homme se plaît à détester, est adepte de recyclage à tout va et qu’après un revival new wave et shoegaze va bientôt venir le moment d’un revival trip hop, Tricky sera toujours là en Thin Black Duke, montrant qu’il est le maître d’un genre qu’il a contribué à façonner depuis une vingtaine d’années.