Les coutures ont beau être un peu grosses, il a beau s’acoquiner avec ce songwriter de génie qu’est Dave Grohl, faire de l’oeil à Thom Yorke, nous faire croire qu’il kiffe Kanye West, force est de reconnaitre qu’après des décennies à être vieux et faire de la musique de vieux pour vieux (‘Press to play‘, ‘Tug of War‘, ‘Pipes of peace‘, ‘Flowers in the dirt‘, ‘Off the ground‘, ‘Flaming pie‘, ‘Driving rain‘…), Paul McCartney semble en effet plus jeune que jamais sur le seul terrain qui vaille : sur disque. Parce que ‘New‘ -malgré son horrible artwork- est un sacré bon disque. Ce n’est pas ‘Ram‘ ni ‘Chaos and creation in the backyard‘ (album sur lequel Nigel Godrich l’a semble-t-il tellement vexé que depuis Macca évite les complaisances boursouflées dans lesquels il se vautrait depuis le milieu des 70) mais c’est un excellent cru. Produit par 4 garçons dans le vent (Giles Martin fils de, Mark Ronson, Paul Epsworth et Ethan Johns), ‘New‘ part dans les quatre points cardinaux de l’écriture de saint Macca : les balades, le rock, la pop et l’éternel moment « je suis un artiste expérimental moi aussi ». A certes divers degré de réussite, mais quand Paul McCartney met dans le mille, ça vole forcément très haut au dessus du reste. La première moitié du disque est d’ailleurs une hallucinante réussite mettant parfaitement en avant la diversité d’écriture du gaucher et son sens de la mélodie hors du commun. Le rock urgent de ‘Save us‘ et l’excellent tarabiscoté ‘Alligator‘ laissent la place à la balade très anglaise ‘On my way to work‘ qui montre des angles aigus avant le gros morceau du disque, la superbe ‘Queenie Eye‘, son refrain en forme de comptine rythmée bien mise en orbite par la prod de Epsworth.
Sur ces 4 premières chansons, Macca fait se passer plus de choses sur des chansons de 4 minutes max que certains groupes sur leur discographie entière. La démonstration se poursuit jusqu’au single ‘New‘ et subit un coup d’arrêt avec ‘Appreciate‘, petite branlo-branlette inepte. Globalement la fin du disque aura un peu plus de mal à tenir le rythme (les poussifs ‘Everybody out there‘ ou ‘I can bet‘) mais restera toujours intéressante, au pire. De plus Paul McCartney a le bon goût de ne pas tenter l’impossible (genre un nouveau ‘Hey Jude‘) ou l’irritant (un truc à la changeons le monde avec de l’amour comme il en a fait tant entre 75 et 2005) et reste digne (‘Looking at her‘) avec plein d’idées d’arrangements toutes chouettes avant de conclure avec classe par un sombre ‘Road‘ (et la ghost track ‘Scared‘).
Les coutures ont beau être un peu grosses, Macca reste ce songwriter de génie qui malgré ses protestations semble avoir toujours besoin d’une forte personnalité en face de lui (ici des producteurs jouant à George Martin ou des Elvis Costello pour jouer à John Lennon) pour faire sortir le meilleur de son jus créatif. Mission accomplie sur ‘New‘, très solide cinquième disque de suite du gaucher faisant oublier les 20 années d’errances, les ‘Hope of deliverance‘, la coupe de cheveux aux douilles… Après 50 ans de carrière, Macca produit toujours de la musique de qualité, c’est déjà énorme.