Le groupe au nom le plus imprononçable du post-rock est de retour pour un quatrième album. Seulement un an après leur dernière apparition live en France, les voici donc avec Heirs. 45 minutes sous le signe de la folie, du retour aux sources sonores et … du chant. Si All Hail Bright Futures était le disque du rebond et de l’émancipation après le départ d’un de leurs membres fondateurs, ce nouveau passage en studio a fait le tri. Finies les expériences à base de claviers, de violons ou d’orgie électro inconsidérée. S’ensuit une allégresse moins palpable et un son plus proche de ce que l’on pouvait entendre dans les 2 premiers albums du groupe.
A ça s’ajoute des paroles de plus en plus présentes avec l’existence de vrais refrains, comme sur, comme sur ‘These Secret Kings I Know‘. Connu pour être les grands naïfs d’un genre austère, And So I Watch You From Afar garde sa patte avec des chants un brin débiles…Indécrottables, ils font encore dans la faute de goût, trop généreux, ne sachant pas s’arrêter, quitte à claquer le choeur de trop. Ou des cuivres improbables et inutiles sur ‘Animal Ghosts‘.
Partant sur de fausses bases avec ‘Run Home‘, similaire au précédent album en version rallongée, Heirs est nettement plus compact. Après s’être rassuré sur sa capacité à créer, le groupe semble s’être concentré sur ce qu’il fait de mieux : tabasser ses instruments vite en faisant le plein d’adrénaline.
Dans cette veine, la réussie ‘Wasps‘ reprend leurs riffs si caractéristiques et les habillent de choeurs en ‘Oh oh’ parfaits pour fédérer une troupe de bonshommes bientôt dégoulinants de sueurs pour l’amour du rock et de la bière. Et tant pis si le morceau sonne au final comme un long couplet et que les passages chantés nous rappelent plus l’ambiance d’un vestiaire que celui d’un studio. Autres bonnes pioches ? ‘People Not Sleeping‘ et sa batterie sèche et son déluge par à-coups. ‘Fucking Lifer‘ sort aussi très vite du lot avec une section rythmique aidée par une ligne de basse funky et pas trop de fioritures pour en faire facilement le meilleur morceau de l’album. Dommage que le refrain se sente obligé d’inclure des voix à un titre qui aurait gagné à rester instrumental.
Dans les mauvais coups, ‘Redesigned a million times‘ et son chant punk rock douteux marque des points. Sur la fin, ASIWYFA balance deux morceaux à l’ancienne avec surtout la lancinante et post-rockiste à mourir ‘Tryer, You‘. Un déjà entendu chiant assez paradoxal qui ne motive pas pour que le groupe revienne intégralement à ce type de morceaux. Est-ce qu’ils en ont fait le tour créativement ou s’agit-il là d’un cadeau pour ceux qui regrettent leurs dernières orientations sonores ? Nous n’irons pas philosopher plus longtemps mais leurs récentes interviews affirment bien la fin du tout instrumental. Un mal pour un bien à en écouter cet essai.
A force de foncer dans le tas, le groupe fatigue peut-être et commence même sévèrement à tourner en rond au vu de la répétition des structures employés sur l’album. Lassitude de l’auditeur ou redite de l’artiste, difficile d’être définitif mais il est sûr qu’Heirs ne restera pas dans les mémoires et sent parfois le pilotage automatique.
Une chose est certaine : ASIWYFA est une bande de joyeux drilles complètement dingue sur scène et leurs tournées sans relâche devrait bien finir par tomber sur vous. Ce qui est encore une excellente raison de ne pas les mettre au placard.