L’année dernière, Six Feet Under et surtout le grand Chris Barnes, l’illuminé à l’origine du projet, décevait tout le monde avec le volume 2 de leur ‘Graveyard Classics‘, reprise intégrale du légendaire ‘Back In Black‘ d’AC/DC : manque de pêche et d’originalité non seulement par rapport à la version originale toujours inégalée mais aussi à leurs précédentes productions. Les fans attendaient donc en toute légitimité le digne successeur de ‘Bringer Of Blood‘ lorsque Chris a annoncé leur entrée en studio en fin d’année. L’attente fut longue mais aujourd’hui ce nouvel album est enfin là, et il se nomme ‘13‘. Treize non pas comme le nombre d’albums du groupe qui sont au nombre de neuf, mais comme le nombre de productions tout court, DVD et lives inclus, que nous a pondu le père Barnes en ces dix longues années passées au sein du groupe.
Provocateur né, le géniteur de Cannibal Corpse est passé comme on le sait du goût prononcé du gore pur à quelque chose de plus nuancé et plus grinçant, kitsch et ridicule pour beaucoup. En effet, depuis qu’il officie avec ses nouveaux compères, la polémique vient plus de la qualité de la musique, de la technique et surtout de la performance vocale du hurleur légendaire, qui sont jugés bien en dessous des standards requis dans ce genre qu’est le death. Etant personellement un grand fan du groupe je ne peux que m’insurger contre de tels propos en y opposant le fait que ce qu’il perd en technique, le quattuor le gagne en groove, élément trop souvent négligé au profit d’une froideur mécanique, d’une course à la performance. Oui, on oublie trop souvent cette spontanéité que dégage une voix sans effet, une guitare avec une disto bien crade, une basse au jeu ‘spaghettis’ duquel même le plus fin mélomane ne distinguerais pas la moindre note et d’une batterie sans trigger et qui ne fill pas une mesure sur deux.
Tout le monde aura donc compris que ‘13‘ est un retour au ‘vrai’ Six Feet Under. Pourtant, sur les premières secondes de ‘Decomposition Of The Human Race‘, la première chose qu’on se dit, c’est ‘tiens, ils ont repris ‘Collapse‘ de Nostromo cette fois…?’. Mais l’impression passe vite lorsque les growls caractéristiques de Chris se font entendre. Pour ceux qui sont familiers du style unique du groupe, dire que les compositions et leur rythmiques extrêmement entrainantes sont du niveau de l’énorme ‘True Carnage‘ suffira à tout résumer : de vraies musiques d’ambiances, véritables B.O. de films de zombies, laissant l’imaginaire produire ces magnifiques images de massacres de morts-vivants à la machette rouillée… Les quelques-uns à avoir vu le kitschissime mais non moins excellent clip de ‘The Day The Dead Walked‘ sauront de quelle ambiance il est question ici.
Pour les autres, précisons que Six Feet Under produit un death lourd, brutal et incroyablement jouissif de par sa simplicité sans limites. Les structures s’enchaînent et se ressemblent, mais si on aime, on ne peut que s’en réjouir. ‘Somewhere In The Darkness‘ ou encore la perle d’humour noir et décalé ‘Rest In Pieces‘ laissent la part belle à des passages instrumentaux propices au remuage de cheveulures et des refrains qui se retiennent en moins de deux alors que ‘The Art Of Headhunting‘ ou ‘Shadow Of The Reaper‘ avec sa lead mélodique, s’enfoncent dans des atmosphères plus sombres et s’aggrémentent de longs solos oldschool.
Difficile de résister à ce ‘13‘, même si il est vrai qu’il reste légèrement inférieur au terrible ‘True Carnage‘ dont chaque titre était un hommage au death gore second degré. Mais après le petit écart de conduite que constituaient les Graveyard Classics, ça fait chaud au coeur de retrouver un groupe aussi emblématique en pleine forme.