The Prodigy ✖︎ Les Arènes ✖︎ Nîmes

La venue de The Prodigy aux Arènes de Nîmes, c’est un peu comme la sortie d’un film avec Audrey Bitoni : un putain d’évènement. Du coup, quelques minutes avant l’ouverture des portes, pour être à la hauteur de l’événement, ton serviteur préféré commande six pastis au comptoir le plus proche de l’amphithéâtre romain — oui, je prends juste l’apéro, ça serait con d’être ivre durant le set du trio d’Essex et de n’avoir aucun souvenir de la soirée le lendemain. Un septième serait quand même le bienvenu : « Patron, je vous en ai commandé six, le septième est gratuit ?« . Pas de réponse. « Ah, ça vous fendrait la gueule de répondre ?« . Forcément, le gonze réagit : « Pas de ça chez nous les soirs de concerts, ça se fait juste pendant la féria« . OK. Non seulement, mes potes et moi, on reviendra vérifier ton honnêteté, mais en plus, on s’amusera à pisser sur ta boutique quand on aura la flemme de trouver des toilettes publiques.

Une fois les premiers fauves lâchés dans l’Arène, Dj Garfld prend le contrôle des platines. Relativement médiocre, et moins hilarant que son homonyme félin (même involontairement), le bonhomme balance The Ting Tings, Daft Punk ou Fatboy Slim pour le plus grand plaisir des quelques lobotomisés qui se trémoussent devant l’impressionnant mur de son. En ces temps de crise financière, il est essentiel de faire des économies : quitte à réaliser un dj-set d’une telle facilité, autant faire confiance à Winanmp Media Player. Ce sera toujours un cachet d’économisé, pour un résultat sensiblement similaire.

Six pastis (et quelques gorgées de bière de rigueur une fois sur place), fatalement, ça donne envie d’uriner. Les minuscules WCs du site étant over-bookés pour deux décennies, ma personne & un fidèle ami raffolant de fist-fuckings (coucou Florent !) décidons d’effectuer nos affaires naturelles au quasi-sommet du monument. Mission accompli, pas vraiment à l’abri des regards indiscrets. Peu de temps après, Birdy Nam Nam investit la scène. Trop ivre pour avoir pu porter un jugement sérieux sur leur passage au Garorock version 2008, je me demande si je vais bien vivre cette prestation, après un virage musical aussi inattendu que regrettable. Et mes craintes se confirment au fil des morceaux. En live aussi, exit les subtilités jazzy et autres merveilles abstract hip-hop. Les quatre tâteurs de turntables ne jouent que des tracks de leur second et dernier album en date, « Manual For Successful Rioting« . Au programme : electro tapageuse, electro tapageuse, electro tapageuse, et surtout electro banale. Certes, « Trans Boulogne Express » et « Worried » dépotent. L’intro’ de « Manual For Successful Rioting« , le morceau, fait obligatoirement headbanguer (Ed Banger ?). Mais merde, le reste manque terriblement de saveur. Même « Abbesses« , petit bijou de leur premier album finalement présent en fin de set, est électronifié à grand coup de kicks boiteux. Le public semble conquis. Me, I’m not.

La déception liée au show de la bande de Dj Pone est vite balayée par la violente excitation provoquée par l’attente de la tête d’affiche. De longues minutes à se remémorer tous ces moments passés à danser sur les sons de The Prodigy, ces claques prises lors de la découverte de leurs albums, […] cette érection phénoménale à la vue de l’annonce de cette date. Et ils apparaissent enfin. Liam Howlett, Keith Flint, Maxim, ainsi qu’un gratteux et un batteur (on se fout de leurs patronymes, n’est-ce pas ?). Ils exécutent un « World’s On Fire » introductif scandé par la foule. Déjà. Les singles « Breathe » et « Omen » suivent, et ne nous laissent aucun répit. Son assourdissant, beaucoup de basses, peu d’aigus. Les notes de guitares heavy de « Their Law » rappellent l’éclectisme du groupe, visible dans la foule, hétérogène. Éclectisme toujours avec « Poison » et ses accents ragga, emboité avec « Warrior’s Dance » et ses influences… dance, justement, remplaçant difficilement son ancêtre, présent jusqu’en 2008 dans les sets du groupe, « No Good (Start the Dance)« . « Firestarter » rend fou les nostalgiques de l’année 1997. Près de la scène, l’ambiance est électrique. Le batteur sort de son rôle de meuble -tapant quelques cymbales pour accompagner les beats surpuissants de Howlett, improvisant quelques paternes lors des enchainements- pour remplacer ce salaud de Dave Grohl sur un « Run With The Wolves » frénétique et teigneux. Keith Flint, toujours plus péroxydé, est diabolique. Dans les pogos, un nez s’écrase sur mon épaule. A défaut de ramener chez moi un t-shirt « Invaders Must Die » à 35 dollars, j’aurai une belle trace hémoglobineuse en guise de souvenir. « Voodoo People » retentit, son break s’impose comme un point culminant du concert, et la troupe s’ecclipse. Tandis que la peur gagne quelques âmes prudes (« Putain l’enculé, c’est fini et ils ont même pas joué « My Bitcheuh » ! » — pauvre enfant), ô surprise, le père Howlett regagne sa tour de synthés pour lancer les notes d' »Omen Reprise« . A cause d’un son plus que brouillon, l’assistance ne reconnait pas directement « Invaders Must Die« , interprété à partir de son pont. Seule surprise de la setlist, le très hip-hop « Diesel Power« , permettant à Maxim de montrer l’étendue de ses talents. Motivé par ce regain d’activité, le bonhomme s’en va même faire un tour dans les gradins. Petite curiosité, le titre tel qu’on le connait sur « Fat Of The Land » a été légèrement modifié. En effet, on peut entendre la boucle étourdissante du « Shut Your Mouth » de Pain (oui, Pain) en fond. « Smack My Bitch Up » est -bien entendu- présente ; à la manière de Slipknot pendant « Spit It Out« , The Prodigy prie le public de s’asseoir durant l’interlude du morceau, avant de s’arracher sur la reprise. Casse-gueule, mais interactif ! Le nouveau hit de la bande, « Take Me To The Hospital« , épuise les derniers agités. Keith Flint est un homme plein de ressources. Ou de coke, au choix. To-ni-tru-ant ! Enfin, et, j’en suis sûr, tu l’as deviné, le mythique « Out Of Space » clôt le concert. Le public reprend en chœur les samples de voix du super-rastafari Max Romeo (« I Chase The Devil« , tu connais pas ?), le groupe salue chaleureusement la populasse (qui s’est déplacée en masse, yo) et se barre. Les lumières s’allument, « Stand Up » est placé dans les enceintes alors que les roadies remballent déjà le matériel. Le public en redemande, s’agite, en vain. Ils ne reviendront pas. La foule siffle avec véhémence. Eh oui, les sudistes sont ingrats.

Un son passable, mais une prestation explosive : dans un cadre magique, visiblement en pleine forme après vingt piges de tournée, The Prodigy a éreinté l’assemblée. On remet ça lors d’un hypothétique retour en France ?

The Prodigy : setlist

« World’s On Fire« 
« Breathe« 
« Omen« 
« Their Law« 
« Poison« 
« Warrior’s Dance« 
« Firestarter« 
« Run With The Wolves« 
« Voodoo People« 
__________
« Omen Reprise« 
« Invaders Must Die« 
« Diesel Power« 
« Smack My Bitch Up« 
« Take Me To The Hospital« 
« Out Of Space« 

Un grand merci à Coudy et Flofloflo !