Linkin Park ✖︎ Bercy ✖︎ Paris

En ce dimanche de novembre, Bercy est en ébullition : il accueille en son sein les mythiques Linkin Park, de passage dans la capitale à l’occasion de leur tournée The Hunting Party Tour. VisualMusic était présent pour assister à ce qui semble être le revival d’une époque presque déchue.

Linkin Park, on sait tous ce que ça veut dire : un premier album qui a marqué toute une génération, un album de remix tout aussi notable, un second effort honorable, le premier mash-up hip-hop/métal vraiment effectif avec Jay-Z … et puis la descente aux Enfers. J’avoue avoir décroché à cette période là, ne me reconnaissant plus dans le tournant que prenait leur carrière.

Et puis 2013 arriva, et avec ça, le long post de Mike Shinoda en réaction à un article déclarant la mort du rock. La toile s’enflamme, Shinoda multiplie les interventions, s’embrouillent avec pleins de groupes . Un vrai drama comme on en fait plus, mais qui marche. Buzz bien rodé ou réveil en sursaut de ce groupe qui s’engluait dans ses propres expérimentations ?

Linkin Park, qui se perdait dans des expérimentations plus ou moins douteuses, revient alors sur le devant de la scène et se présente comme des papas cools du rock/métal en mode « on va vous apprendre la vie les gars » : le groupe décide de jouer Hybrid Theory en entier au Download Festival 2014, puis de faire une apparition surprise au Warped Tour 2014 où tous les groupes de la scène alternative actuelle défileront sur scène pour les featurings les plus dingues jamais pensés. Comme s’ils avaient besoin de prouver quelque chose à leurs détracteurs. Comme pour justifier le soudain revirement « hard » de leur nouvel opus « The Hunting Party ». Avec l’adoubement de la scène alternative (aka « de tous les kids qui ont grandi avec Hybrid Theory »), c’est l’assurance d’un renouvellement de leur public, et donc d’une pérennité sur la scène rock actuelle. Pas bête la bête. Mais franchement, les mecs de chez LP sont-ils aussi calculateurs que ça ?

Pas si sûr. Présente au Download Festival, j’ai eu la surprise de voir un groupe détendu et pas prise de tête, tout sourire, réalisant à peine l’impact qu’a eu son premier album sur le monde de la musique. Mike Shinoda fera d’ailleurs un discours émouvant à ce sujet, déclarant n’avoir compris que récemment l’influence de son groupe, citant Oliver Sykes de Bring Me The Horizon croisé un peu plus tôt dans les coulisses : « c’est grâce à Hybrid Theory que j’ai décidé de faire de la musique. »

Sortie de cette soirée dantesque où, je l’avoue, j’ai lâché ma petite larme en hurlant les paroles de In The End, j’hésitais entre un « mince je me suis faite avoir », et « c’est quand même un putain de groupe ». Me voilà à arpenter leur page Facebook, cherchant les nouveaux titres, les dernières infos, car ils l’ont dit : leur prochain album sera définitivement plus heavy, pour redorer le blason du rock. Mon cœur se gonfle d’espoir … et n’est pas déçu. Oui The Hunting Party est plus rock, a un côté très « fait maison » tout en restant hyper bien produit et conservant les recettes qui ont fait le succès de Linkin Park. Somme toute, l’album reflète parfaitement l’esprit de LP, un résumé de leur carrière, mais également de leur philosophie.
Curieuse, je veux donc voir ce que donne le nouvel album en live, et me voici donc le 16 novembre dernier dans un Bercy archi complet de fans, à la limite de la secte.

Mais avant d’attaquer ces deux heures de set, c’est Of Mice & Men, nouvelle sensation metalcore du moment, qui ouvre le bal. Visiblement ravi d’être là, le groupe investit rapidement la scène, comme à la maison. Le public semble assez décontenancé lorsque les premiers hurlements de « Public Service Announcement » raisonnent, mais c’est vite oublier d’où viennent Linkin Park. Rapidement les premiers rangs bougent la tête en rythme, captivés par le charisme d’Austin Carlile. Des fans, bien plus nombreux que ce à quoi l’on pourrait s’attendre pour une première partie, font également entendre leur voix. OM&M enchaîne ensuite avec son dernier single de l’époque, « Feels Like Forever », dont les airs arabisants finissent de conquérir le public.
S’en suit alors un set impeccablement orchestré, aussi bien au niveau de la setlist que de la mise en scène avec des lights superbes. Calibré pour la conquête, le show a varié entre titres rageurs (« The Dephts ») et d’autres plus fédérateurs à coups de gang vocals (« You’re Not Alone »), et après 30 minutes à fond les ballons, Of Mice & Men quitte la scène sous les clameurs d’une foule charmée, Austin drapé de l’étendard français tel Guillaume et sa cape conquérante.

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Dès lors, la tension se fait sentir dans Bercy. Les fans trépignent d’impatience, et après plusieurs olas, applaudissements et autres hurlements, les lumières s’éteignent enfin sur une scène imposante composée de trois cages à oiseaux géantes (où seront parqués les pauvres Joe, Rob et Mike). Une intro retentit alors, mélangeant entre autres « The Requiem », « The Summoning » et « The Catalyst », avant que ne soit entonné le premier single de The Hunting Party, « Guilty all the Same[/i ] ». Chester Bennington débarque sur scène, tout feu tout flamme (vous voyez très bien de quoi je parle), prêt à embarquer les quelques 16 000 personnes présentes dans une danse folle. Le public suit immédiatement le leader charismatique, rapidement rejoint sur l’avant-scène par son acolyte Mike Shinoda (qui a réussi à se libérer de sa cage aux poules infrarouge entre temps). Les garçons partagent une complicité palpable, ainsi qu’une joie évidente de retrouver leurs fans qui le leur rendent bien.

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Histoire de faire perdurer l’atmosphère nostalgique qui règne sur Bercy, le groupe enchaîne sur les tubes de son premier album, « With You », « One Step Closer », « Papercut » et « Runaway ». L’alchimie fonctionne, et on n’entend presque plus Chester tant la foule semble prise de folie. Les anciens titres font donc toujours mouche, et, en douceur, le nouvel album est introduit dans la setlist. Ses chansons se marient parfaitement avec les autres morceaux, formant ainsi le pont entre l’ancien et le nouveau Linkin Park. « Rebellion » restera d’ailleurs comme LE titre représentatif de ce renouveau, alliant un son brut, le chant clair de Shinoda et les cris de Chester.

Nous n’aurons pourtant que cinq titres de The Hunting Party, le groupe ayant pris le parti de parsemer sa setlist de … medleys ! En effet, leur discographie devenant de plus en plus imposantes, le sextet nous a concocté quelques medleys bien sentis, histoire de contenter tout le monde. L’idée en a surpris plus d’un pendant le concert et a un côté un peu frustrant, mais ces mix sont tellement bien conçus qu’on a franchement du mal à en vouloir au groupe. Le travail de Joe Hahn est donc à saluer, sans parler de la patte caractéristique de Shinoda, qui s’impose comme le véritable leader de la troupe. Il dirigera d’une main de maître ce show, incluant même un morceau de son projet solo Fort Minor, « Remember The Name ».

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La performance vocale de Chester est également à noter, les années n’ayant en rien altéré l’organe marque de fabrique du groupe. Le temps d’un petit featuring sur « Faint », ses cris seront doublés par ceux d’Austin Carlile, donnant encore plus de puissance au break de la chanson.
D’autres temps forts viendront ponctuer la soirée, concordant avec les singles les plus emblématiques du groupe : « Numb », « Until The End » (évidemment), « What I’ve Done », ou bien le final, « Bleed it Out ».

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En sortant de Bercy ce soir-là, difficile de ne pas avoir le sourire aux lèvres. Malgré une popularité toujours grandissante, force est de constater que Linkin Park est toujours au top. Leur discographie parfois disparate prend aujourd’hui tout son sens, montrant en réalité un groupe qui expérimente au fil du temps, ne voulant pas s’enfermer et brisant des carcans de toute façon trop lourds à porter. La force de Shinoda et sa bande, et c’est étrange de l’admettre, c’est leur simplicité qui transparait jusque sur scène. Après tant d’années, le plaisir de faire de la musique est toujours là, plus vivace que jamais. De là, la performance suit naturellement, allant droit au but, droit au cœur. Difficile donc de douter de la sincérité de Linkin Park, et je me sens tout bonnement heureuse d’avoir pu effectuer le temps d’une soirée un joli voyage dans le temps.